Edito : Les Associés

Éphésiens 3,6 : « Ce mystère, c’est que toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Évangile. ».

Dans cette lecture de la fête de l’Épiphanie, l’auteur de l’épitre aux Éphésiens parle du mystère du Christ. Mystère, sacrement, le même mot pour dire une réalité visible habitée, porteuse d’une réalité spirituelle qui rayonne en elle : le visible par lequel et à travers lequel Dieu invisible s’exprime. Cette réalité visible, charnelle, c’est la sainte humanité de Jésus le Christ, en qui Dieu s’exprime jusqu’au bout, c’est la chair de la communauté d’Ephèse, faite de chrétiens juifs et de chrétiens païens (les « nations ») : à travers leurs efforts pour s’aimer (se supporter) à cause du Christ qui a donné sa vie pour les uns comme pour les autres, l’auteur voit rayonner la Révélation de Dieu Lui-même, la Volonté divine d’associer toutes les nations, à l’héritage de son peuple.

En ce début d’année, je nous souhaite à tous et chacun d’être rayonnants, enflammés par cet Amour de Dieu pour tous et chacun, habités et travaillés par la Parole évangélique ; en présence de Jésus, en présence de sa communauté où le très divers se lie d’amour par l’amour de Jésus, mille chemins d’« association » se dégagent, dont nous n’avons pas à définir les contours à l’image de nos peurs. Jésus lui même ne marche pas avec un calepin où il comptabiliserait les adhérents : il proclame l’Évangile à Israël, guérit les malades, fait parvenir la Bonne Nouvelle aux exclus, porte en Lui tout l’amour de Dieu. Il accueille de bon cœur ceux que son Père attire à Lui, appelle certains à le suivre et d’autres à rentrer chez eux, avec plus ou moins de succès dans les deux cas. Il n’est pas comptable du mode d’« association ».

Pour nous aussi : certains sont prêts à adhérer par le baptême, à être « incorporés » au même corps, et nous sommes joyeux de les accueillir, nos chers catéchumènes, la prunelle de nos yeux, mais d’autres, là où ils en sont, accueillent l’amour de Dieu d’une manière que Dieu connaît et qui peut nous échapper, pourvu que la chaleur de l’amour de Dieu qui rayonne sur le visage du Christ transparaisse en nous et anime notre vie et nos relations.

Ceux qui vont se creuser la tête pour trouver les mots justes, les images parlantes, pour dire le cœur de la foi dans la catéchèse des petits et des grands sont porteurs du Christ. Mais sont aussi porteurs du Christ, ceux qui vont s’engager dans l’épicerie sociale à cause de l’amour de Dieu pour ceux qui souffrent des fins de mois difficiles.

À cause du Christ, certains travaillent sur le lien : ceux qui sont engagés dans le dialogue ou dans l’action interreligieux, ou dans le travail œcuménique, ou dans la bonne entente intracommunautaire, ou dans la recherche de refondation du lien social dont les blessures sont manifestées par la crise actuelle de notre pays. Parce que nous ne sommes pas une marque religieuse de plus en concurrence avec les autres, le lien entre les humains et le dialogue interreligieux ne nous intéresse pas seulement quand il lie des adhérents à notre groupe. À cause du Christ, nous essayons d’être catholiques, concernés par la variété des situations où nous reconnaissons que le Père, présent à toutes ses créatures par son Esprit répandu, envoie son Fils et ses fils, nous, pour lutter contre tout ce qui délie, qui fait de la vie un enfer et éloigne du paradis. Le paradis est défini dans la constitution apostolique Lumen Gentium comme « communion des hommes entre eux et avec Dieu ». La possibilité de vivre ensemble et de faire société ensemble est voulue par l’amour de Dieu.

L’un perçoit que le Christ Jésus dont il est porteur parle merveilleusement du Père, un autre porte son environnement dans la prière avec intensité, un autre sait que le Christ dont il est porteur soigne inlassablement les personnes ou les structures sociales…

On peut débattre des priorités à tel moment, mais globalement notre mission baptismale n’est pas fromage ou dessert : porteur du Christ, c’est et Prêtre et Prophète et Roi… Sans calcul, par amour.

Père Dominique Doyhénart, curé